PCF - Buffet
extrait de l'allocution prononcée par Marie-George Buffet à l'occasion de la cérémonie des voeux à la presse, 17/01/2005
Faire autrement, pour commencer, cest nécessaire et possible en Europe. Cest le débat qui est aujourdhui au cur de la controverse politique avec le projet de traité constitutionnel européen.
Je dois vous avouer que la manière dont sengage le débat me semble assez délirante. Alors que ce texte est connu depuis 2003 et quil structure le débat politique depuis un an et demi, le gouvernement tarde, le mot est faible, à assurer la diffusion. On ne connaît toujours pas la date du référendum. Quel sens de la démocratie !
Dès le départ, on a commencé à nous expliquer quil y avait le camp des méchants et celui des gentils, le camp des dangereux et celui des raisonnables, le camp du repli et celui de louverture. Ce ne serait pas une élection politique, nous dit Jacques Chirac. François Hollande prétend que ce texte nest « ni de droite, ni de gauche ». Ce serait une simple approbation technique déconnectée des enjeux de la vie quotidienne et des choix qui régissent la marche de la société. On croit rêver ! Jai même entendu quelquun demander au gouvernement de se tenir à lécart du débat pour ne pas permettre à ses détracteurs de faire le lien entre la politique libérale du gouvernement et le caractère libéral du traité. Jean-Pierre Raffarin parle dune campagne « non-partisane » et formule comme premier vu que la France dise « oui ». Que dhypocrisie ! Je crains que tout ce fatras nait pour autre but que dencourager labstention. Les communistes se battent pour que notre peuple sexprime en toute connaissance de cause !
Ce choix engage lourdement notre vie quotidienne. Ecoutez les postiers, les cheminots, les agents de la fonction publique, les enseignants. Ils sont dans la rue cette semaine, contre la politique de Jean-Pierre Raffarin. Ecoutez les salariés dans leur ensemble qui seront mobilisés le 5 février pour défendre les salaires et la réduction du temps de travail, écoutez celles et ceux dH&M, de Lustucru, de Wolber et tant dautres qui refusent la loi du profit aggravée par le gouvernement. Et cest cette même politique quon voudrait voir imposée à toute lEurope.
Je le répèterai sur tous les tons : ce traité grave le libéralisme dans le marbre. Il avalise la politique menée par Jean-Pierre Raffarin et donne quitus aux projets dErnest-Antoine Seillière. Il porte en lui la casse des services publics, une politique monétaire favorable à la spéculation financière et prédatrice pour lemploi et les salaires, la casse des droits collectifs existants, la sujétion à lOTAN Il na quune ambition : « un marché ouvert où la concurrence est libre et non-faussée », comme cest écrit à de nombreuses reprises. Tout le reste nest quhabillage. Eh bien il faudra sy faire à lespérance que représente le « non » pour une autre Europe. Et il sera impossible de poursuivre les caricatures politiciennes faites pour refuser le débat et ne pas assumer les choix en question. Personne dailleurs nest obligé de donner crédit à ce type de campagnes.
Le débat traverse la gauche. Faut-il composer avec le libéralisme ou faut-il lui opposer dautres logiques ? Le débat est ouvert. Nous pensons quà gauche, il faut dire « non » et combattre loffensive libérale qui pousse les feux du capitalisme mondialisé. Ce nest pas pour rien si Jacques Chirac a pris la tête de la coalition du « oui » ! Nous allons nous adresser au peuple de gauche : prenez la gauche en mains, donnez de la voix, votez « non » pour ouvrir lavenir à une véritable justice sociale, à une véritable démocratie, à un autre monde. Lavenir de lEurope, lavenir de notre peuple, lavenir de la gauche sont entre vos mains.
Imaginons un peu si le « non » lemportait, et franchement, cette bataille est gagnable. Celles et ceux que je rencontre à travers la France, dans leur diversité, ne témoignent franchement pas dune adhésion au contenu de ce texte. Alors, quand le « non » lemportera, est-ce que ce sera le chaos ? Non. Ce sera le KO pour Seillière, Raffarin et Sarkozy. Mais quelle formidable espoir pour tous ceux et celles qui veulent une vie meilleure ! Cest une nouvelle ère de la Construction européenne qui souvrira sur dautres bases. Cest pourquoi, nous allons nous attacher à donner à voir dans la campagne de lampleur des possibles autant que des dégâts provoqués par cet infâme traité.
Je suis confiante sur la volonté des françaises et des français de sinformer sur le référendum et de se prononcer sur le fond. Je crois quil faut poser le plus rapidement possible un cadre démocratique à cette consultation. Je lance un appel devant vous à tous les partisans de cette Constitution européenne à débattre. Si les partisans du « oui » sont si sûr de leurs arguments, ils nont sans doute rien à craindre de débats contradictoires. Pour ma part, je souhaite que lannée qui sannonce soit placée sous le signe de la démocratie. Pas la démocratie de parade où il ne reste pas grand chose que des effets de manches. Mais plutôt une démocratie du courage.